Laliberte blanchette comp

Le 5 avril dernier, l’Ordre a rencontré le ministre de la Forêt, de la Faune et des Parcs, monsieur Luc Blanchette. Nous avons abordé avec lui trois sujets qui touchent de près la pratique professionnelle et ce, sur une base de discussions franches et sincères.

Le projet de loi 122 et la règlementation municipale

D’entrée de jeu, nous avons soutenu auprès de M. Blanchette notre position à l’effet que les règlementations municipales en matière de contrôle des coupes forestières devraient être harmonisées à l’échelle des MRC. Pour l’Ordre, l’élaboration et l’application de ces règlements devraient se faire avec la participation d’ingénieurs forestiers, ceci dans le but d’assurer leur cohérence avec la science forestière. Actuellement, nous constatons que plusieurs règlementations s’avèrent partiellement contradictoires avec cette science. De plus, une règlementation adéquate en matière de coupe forestière en forêt privée constitue une des clés du succès du Plan de mobilisation des bois annoncé récemment par le ministre.

La table MFFP-OIFQ
Tel qu’annoncé en 2015, une table MFFP-OIFQ a été formée pour discuter du cadre de pratique des ingénieurs forestiers au MFFP. Cependant, cette table ne s’est réunie qu’à deux reprises depuis. À nos yeux, cela est insuffisant pour faire avancer les dossiers. Nous sommes heureux que le ministre, en présence de messieurs Ronald Brizard et François Provost, ait réitéré l’importance de maintenir cet espace de discussions et de trouver les moyens pour que la table puisse rapidement reprendre ses travaux.

La performance de notre filière forestière
Le régime forestier actuel aura bientôt 5 ans. Bien qu’il soit fondé sur des principes que nous ne remettons pas en question, nous croyons qu’il est temps de faire une réflexion sur les moyens qui pourraient permettre d’améliorer la performance de notre filière forestière et de mettre pleinement à contribution l’expertise des ingénieurs forestiers. Nous avons demandé au ministre de mettre sur pied un groupe de réflexion afin d’aborder notamment les deux enjeux suivants :

Une pratique en « silos » et des tâches fragmentées
L’Ordre a indiqué au ministre qu’il observe un malaise persistant quant à la pratique professionnelle chez les ingénieurs forestiers, autant au MFFP que chez les autres employeurs. Actuellement, l’organisation des environnements de pratique fait que les ingénieurs forestiers œuvrent trop souvent dans un environnement dit en « silos » et sont confrontés à une fragmentation des tâches qui ne leur permet pas toujours de faire une supervision et un suivi adéquats des projets. À cet égard, des exemples d’erreurs coûteuses et de mauvais investissements nous sont rapportés. Malgré le développement rapide des nouvelles technologies, celles-ci ne peuvent remplacer la réflexion et l’analyse d’un professionnel face à un projet qu’il contrôle du début à la fin.

L’analyse des modèles de gestion forestière à succès
Nous avons discuté avec le ministre de trois exemples québécois où la récolte soutenue et durable de matière ligneuse est d’au moins le double de celle des territoires publics en périphérie (Forêt Montmorency, Séminaire de Québec, propriétés privées de Domtar). En plus d’être plus productifs, ces territoires sont certifiés et ils sont aménagés de manière rentable pour offrir de multiples autres services comme la villégiature, les activités sportives, la chasse, la pêche, la production d’énergie éolienne et autres. Notons aussi que la forêt Montmorency doit composer avec la présence d’une harde de caribous forestiers. Il existe également des cas de succès dans d’autres pays comme la Suède, la Finlande et la Nouvelle-Zélande. On entend souvent dire que ces territoires sont très différents de la forêt publique québécoise, et qu’on ne pourrait y transposer leurs modèles de gestion. Avons-nous vraiment étudié la question? Nous croyons qu’il serait temps d’y réfléchir, surtout que le contexte actuel nous pousse à rechercher des solutions qui rendront notre filière forestière plus performante et plus compétitive.

Nous suggérons que ce groupe de réflexion puise à différentes sources, notamment chez les universitaires. Et qu’en plus de forestiers d’expérience, des biologistes, des économistes et des experts de la gestion des organisations en fassent partie. Nous sommes persuadés que les exemples que nous avons mentionnés connaissent du succès, non seulement en raison des méthodes et des investissements sylvicoles mis de l’avant, mais également en raison d’une configuration particulière de leurs organisations qui permet aux professionnels de la forêt d’œuvrer dans un environnement où leurs compétences sont pleinement mises à profit. Le groupe proposerait des mécanismes permettant de transposer ou d’adapter les pratiques gagnantes à la forêt publique du Québec. Ce travail déboucherait rapidement sur la mise en place de projets pilotes afin de tenir compte de la diversité des régions.

Nous remercions le ministre d’avoir accepté de nous rencontrer. Nous espérons qu’il donnera suite à nos demandes et nous lui réitérons notre intérêt à collaborer afin de continuer de servir un public québécois soucieux de l’avenir de ses ressources.